Antitrust : la Cour Suprême donne son feu vert à un procès contre Apple

Lorsque vous achetez une application sur l’App Store, vous ne l’achetez pas aux développeurs mais à Apple. Quand bien même la marque à la pomme n’en fixe pas le prix, le contrat passé avec les éditeurs et la commission prélevée jouent un rôle sur les prix. Ainsi conclut la Cour Suprême qui valide une action en justice menée contre Apple.

C’est un procès qui pourrait changer la donne. La Cour Suprême des Etats-Unis a autorisé la poursuite d’une action en justice intentée par plusieurs propriétaires d’iPhone contre Apple. Ces consommateurs accusent la marque à la pomme d’entretenir une position monopolistique, par le biais de l’App Store. Une position qui lui permet d’influer sur les prix des applications mobiles, la commission de 30% prélevée sur les ventes participant à « faire payer aux consommateurs des prix plus élevés que les prix concurrentiels ».

En première instance, Apple a remporté la partie, le juge adhérant à l’argument du géant selon lequel les propriétaires d'iPhone ne pouvaient pas le poursuivre parce qu'ils ne sont pas « des acheteurs directs d'Apple » en vertu d’une jurisprudence de la Cour Suprême en date de 1977, Illinois Brick. En d’autres termes, l’entreprise de Tim Cook estime ne pas être le vendeur des applications de l’App Store et que les utilisateurs achètent les applications aux développeurs, qui en fixent les prix.

Une interprétation de la jurisprudence que la cour d’appel a battue en brèche, considérant que les propriétaires d’iPhone sont des « acheteurs directs » d’Apple en ce qu’ils achètent directement leurs applications auprès du géant. Une analyse à laquelle la Cour Suprême souscrit. « Apple fait valoir que Illinois Brick permet aux consommateurs de poursuivre en justice uniquement celui qui fixe le prix de vente au détail, qu’il vende ou non le bien ou le service directement à la partie plaignante » explique la Cour Suprême.

Modèle pervers

Une argutie fausse en plusieurs points, ajoutent les juges. Cette interprétation du droit reviendrait à permettre aux consommateurs de poursuivre un détaillant dans une situation monopolistique lorsque celui-ci, sur la base des contrats signés avec les fabricants (ici les éditeurs d’applications), fixe les prix de vente en fonction du prix qu’il aurait payé directement au fabricant pour ce même bien ou service, mais pas dans le cas où le prix est fixé par le fabricant et où le détaillant prélève une commission.

« La thèse d’Apple fournirait une feuille de route aux détaillants monopolistiques pour structurer les accords avec leurs fabricants ou leurs fournisseurs de manière à échapper aux actions antitrust des consommateurs et à contrecarrer ainsi une mise en œuvre effective des règles antitrust » assène la Cour Suprême. Et en dehors de la très stricte interprétation de la jurisprudence, la plus haute juridiction américaine pointe également l’absence d’intermédiaire dans l’achat d’une application sur l’App Store entre Apple et l’acheteur final, constitutive d’une transaction directe entre la marque à la pomme et les propriétaires d’iPhone.

Cette décision de la Cour Suprême est importante, car elle concerne par ricochet de nombreux autres services distribuant des applications, à l’instar de Google ou de Microsoft, mais aussi des biens, tels qu’Amazon. De fait, les juges reconnaissent aux consommateurs le droit d’intenter des actions antitrust en justice contre ces géants, confirmés comme des vendeurs « directs » dotés d’une position monopolistique et non comme de simples intermédiaires entre le consommateur et le fabricant « fixant le prix » de son produit.