IoT : Que reste-t-il à la Zéro G ?

Le secteur des réseaux IoT est en pleine ébullition. D’origine française, les technologies à basse consommation et longue portée de type LoRaWan, et celle de Sigfox a plus bas débit, font face à la concurrence des technologies LTE-M et NB-IoT, portées notamment par la Chine et les États-Unis. S’y ajoute l’ombre de la 5G, et l’Internet des objets, son application phare. Toutes ces technologies vont-elles survivre ou s’oriente-t-on vers la domination d’une seule d’entre elles ?

Il y a une décennie, une petite PME toulousaine décidait de révolutionner le marché des communications radio «Machine to Machine», avec une technologie à contre-courant de la course à la performance du secteur des télécoms : Sigfox faisait le pari d’un système bas débit, basse consommation et à longue portée. Il exploite le protocole UNB (Ultra Narrow Band), déjà utilisée pendant la Première Guerre mondiale pour communiquer avec les sous-marins. L’approche a, depuis, fait émules etd’autres acteurs, dont les opérateurs télécoms, se sont réunis au sein de la LoRa Alliance pour développer la technologie LoRa. La proposition est similaire : une basse consommation, une longue portée, mais des débits supérieurs : jusqu’à 50 kbps pour LoRa contre 600 bps au maximum pour Sigfox. Parallèlement, deux autres protocoles ont émergé, notamment en Asie et aux États-Unis : le LTE-M et le NB-IoT. Exploitant les réseaux de téléphonie mobile, ils offrent des débits encore supérieurs à ceux du protocole LoRaWan et celui de Sigfox (1 Mps pour le LTE-M et 250 kbps pour le NB-IoT), mais également une consommation plus élevée (+20 à +25%).

Ces quatre technologies forment aujourd’hui la famille des réseaux LPWAN (Low Power Wide Area Network). Loin d’avoir encore révélé tout leur potentiel, les réseaux LPWAN semblent déjà confrontés à un concurrent de taille : la cinquième génération de téléphonie mobile. Disponible en France depuis la fin 2019, la 5G est en effet aujourd’hui exploitée pour désaturer les réseaux 4G (notre dossier dans L’Informaticien n° 191). Mais demain, elle a vocation à être aussi exploitée dans le domaine de l’Internet des objets (IoT). Et les promesses sont alléchantes. À l’horizon 2025, la 5G devrait permettre de connecter un million d’objets par cellule pour faire du «massive IoT», c’està-dire densifier les objets connectés sur une zone. La 5G doit également évoluer vers la basse consommation avec pour objectif d’atteindre une autonomie de dix à quinze ans pour les objets connectés, soit l’équivalent de ce que propose Sigfox ou LoRa.

L’éclairage intelligent est un des récents cas d’usage des réseaux LPWAN.

À ces spécificités autour de l’IoT s’ajoutent bien entendu les atouts fondamentaux de la 5G : des débits au moins 10 fois supérieurs à la 4G et une latence 10 fois moindre : de l’ordre de la milliseconde. Dès 2023, la 5G intégrera également le Network Slicing, une innovation technique plutôt intéressante pour l’IoT. Elle consiste à «découper en tranche» le spectre réseau afin de garantir la sécurité et les performances du transfert d’information sur un canal dédié. Une fonction qui, combinée à la très faible latence de la 5G, pourrait s’avérer très utile pour l’«IoT critique». Dans ce nouveau domaine de l’Internet des objets, les données ont besoin d’être transmises en temps réel avec un maximum de fiabilité, afin d’assurer un pilotage à distance des équipements. L’un des principaux cas d’usages de cet IoT critique est le véhicule autonome.

Sigfox sous pression

Dans ce contexte concurrentiel exacerbé, Sigfox fait de la résistance. Avec l’arrivée de la 5G, certains clients potentiels sont devenus hésitants. « Nous constatons quelques effets négatifs chez certains prospects qui n’ont pas encore acquis une grande maturité sur l’IoT. Ils se questionnent sur la meilleure technologie à choisir et l’arrivée de la 5G ne simplifie pas ce choix. Cela a pour effet de ralentir leur prise de décision», confie Christophe Fourtet, co-fondateur et directeur scientifique de Sigfox.

Des hésitations qui n’arrivent pas au meilleur moment pour la licorne toulousaine. L’entreprise n’a toujours pas atteint l’équilibre financier et a commencé à vendre les réseaux qu’elle opérait en propre. En septembre dernier, Sigfox a ainsi vendu son réseau allemand à Cube Infrastructure Managers. Et pour 2021, elle devrait faire de même avec les réseaux opérés en Espagne, aux États-Unis et en France. À la fin septembre, Sigfox a également lancé un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) qui prévoit près d’une cinquantaine de départs, sur un effectif total de 400 salariés. Dans ce contexte difficile, le directeur général de la PME, Ludovic Le Moan, n’a pas hésité à tirer à boulets rouges sur la 5G, en la qualifiant d’«ineptie totale pour l’Internet des objets » de par sa consommation trop élevée. La consommation électrique d’un objet serait ainsi jusqu’à 10 fois inférieure sur un réseau Sigfox que sur un réseau 4G ou 5G.

La télérelève de compteurs d’électricité, d’eau et de gaz est l’une des applications historiques des réseaux IoT.

Rappelons que pour réduire cette consommation, la technologie de la licorne toulousaine est volontairement bridée. En voie montante, chaque objet ne peut ainsi transférer qu’un maximum de 140 messages par jour et chaque message ne peut contenir que 12 octets de données. En réception : la quantité de messages est quant à elle limitée à quatre par jour. Le marché de la PME hexagonale est donc très spécifique et se limite à des cas d’usages exploitant des capteurs ultra simples, ne communiquant que très peu de données et restant inactif la plupart du temps. L’un des plus gros clients de Sigfox est ainsi Verisure, dont plus d’un million d’alarmes exploitent un réseau Zéro G en backup, c’est-à-dire pour envoyer des alertes lorsque la connexion principale (filaire ou cellulaire) est interrompue. La PME toulousaine possède également des clients dans le domaine des services postaux comme An Post en Irlande ou DHL en Allemagne. Ils utilisent une connexion Zéro G pour optimiser leur chaîne logistique, grâce au suivi à distance de chariots servant à acheminer les colis. «C’est un secteur clé pour nous», confie Christophe Fourtet. Toujours dans le domaine de la logistique, le groupe PSA exploite le réseau Sigfox pour suivre le transport de pièces entre ses fournisseurs et ses usines de montages.

En France, Sigfox possède également des clients dans le domaine de la santé comme Citycare, solution de contrôle et de maintenance à distance de défibrillateurs. Un système développé avec le fabricant de capteurs IoT : Adeunis. «Il est ainsi possible de vérifier à distance le bon fonctionnement du défibrillateur, avec un autocheck quotidien», confie Frank Fischer, son PDG.

Ces principales applications de la technologie Sigfox n’ont donc ni besoin de débits élevés, ni de latence à la milliseconde. Elles n’entrent pas en concurrence directe avec la 5G. Un message que Sigfox compte bien faire passer auprès de son écosystème afin de réduire les risques d’attentisme. « C’est à nous d’éclairer les entreprises et de les aider à définir clairement leurs besoins, en fonction des usages », estime Christophe Fourtet.

En revanche, les autres technologies LPWAN concurrencent clairement Sigfox. Le LoRaWan tire son épingle du jeu grâce aux réseaux privés locaux déployés notamment dans les collectivités territoriales (lire ci-après). Face à la technologie LoRa, Sigfox compte également miser sur cette approche «hotspot». «Nous allons renforcer notre activité autour des réseaux locaux privés. Nous avons par exemple un projet de réseau privé avec l’un des plus gros fournisseurs d’électricité en France sur un de ses sites-IoT », indique Christophe Fourtet.

Comme le LTE-M à l’international, le NB-IoT concurrence aussi la PME toulousaine. «Une des forces de Sigfox est d’être présent dans 72 pays et régions », rappelle Emmanuel Mouton, CEO et fondateur de Synox Group, éditeur et intégrateur de solutions IoT. «Nous proposons donc sa technologie à des clients internationaux, par exemple pour du tracking de produits ou de marchandises à travers toute l’Europe. Mais la demande est en train de baisser. Sigfox est concurrencée par le LTE-M ou le NB-IoT.» La licorne hexagonale va donc poursuivre son expansion internationale de manière « plus pragmatique et ciblée», en tenant compte du contexte concurrentiel. «Cette expansion sera de facto un peu moins rapide que par le passé. Mais la couverture mondiale de notre réseau reste un de nos principaux atouts », conclut Christophe Fourtet.

Quand la 5G fait la promotion du LPWAN

Les autres acteurs positionnés sur le LPWAN, semblent moins sur la défensive que Sigfox, surtout face à l’arrivée de la 5G. « La 5G donne un coup de projecteur sur les différents types de réseaux pouvant servir à l’IoT et pousse les clients à identifier leurs besoins afin de choisir, avec nous, la technologie la plus adaptée », assure Stéphane Allaire, directeur programme 5G de Bouygues Telecom. Un point de vue partagé par Benoit Vagneur, président de Sensing Vision, qui participe notamment au déploiement du réseau LoRaWan sur le département du Finistère (lire encadré). « Je pense que la 5G va démocratiser les réflexions autour des objets connectés et ainsi promouvoir l’ensemble des technologies IoT.» Ces acteurs mettent en avant la complémentarité des technologies réseau IoT qui peuvent se combiner pour certains cas d’usages. C’est le cas par exemple dans le domaine de l’éclairage public intelligent (Smart Lighting). « Un groupe de luminaires seraient connectés entre eux en LoRa, puis un lampadaire relais en 5G, qui transférerait les données de ce groupe à un centre de supervision », explique Yannick Delibie, co-fondateur de Kerlink, fournisseur de solutions réseau pour l’Internet des objets.

Cette combinaison est déjà une réalité dans de domaine de la gestion des déchets. Des sondes de remplissage, connectées en LoRa ou en NB-IoT, sont installées dans les points d’apport volontaire. Elles surveillent ainsi le taux de remplissage des conteneurs. Dans les camions benne, des tablettes exploitant un réseau 4G, indiquent les conteneurs à collecter, en fonction de ce taux de remplissage. Ce système permet d’optimiser les tournées, en ne déplaçant les camions que lorsque les conteneurs sont suffisamment remplis. « Nous avons déjà une centaine de collectivités qui utilisent ce type de système », confie Taisei Miura, directeur général de la BH Technologies, PME grenobloise spécialisée dans ce secteur. La combinaison LPWAN et 5G devrait même être intégrée dans de futurs équipements réseau. Orange étudie ainsi le développement de terminaux bi-modes. « Pour les entreprises, c’est un gage de pérennité des solutions », indique Jean-Marc Lafond, directeur du portefeuille IoT. « Nous leur garantissons une possibilité d’exploiter le réseau qui répond le mieux à leur besoin sur la décennie à venir. Les entreprises ont besoin d’être rassurées sur ce point, de savoir qu’elles investissent dans une technologie pérenne.»

L’optimisation de la gestion des déchets combine des réseaux IoT non cellulaires à ceux exploitant les réseaux de téléphonie mobile.

Les collectivités préfèrent le LoRaWan

Si la 5G et le LPWAN peuvent unir leur force sur certains cas d’usages, d’autres segments du marché IoT donnent clairement l’avantage à une de ces technologies. Les collectivités territoriales affichent ainsi une préférence très nette pour le LoRaWan. Il faut dire que la 5G a suscité une levée de bouclier chez bon nombre d’élus. Martine Aubry a, par exemple, fait voter en octobre dernier un moratoire retardant le déploiement de la 5G dans la capitale des Flandres. « Parce que nos doutes persistent tant du point de vue sanitaire que de la sobriété numérique sur le déploiement de la 5G », avait alors déclaré l’ex-ministre.

Mais avant même cette vague anti-5G, le LoRaWan a séduit de nombreuses collectivités pour sa capacité à créer des réseaux en propre, c’est-à-dire opérés par la collectivité ou un de ses délégataires. « L’avantage de la technologie LoRaWan est d’être ouverte et de facilement permettre de créer des réseaux locaux privés », souligne ainsi Benoit Vagneur de Sensing Vision. « Construire un réseau en propre avec la technologie LoRaWan coute relativement peu cher et permet à des collectivités ou des syndicats d’énergie d’avoir la complète maitrise du réseau, notamment sur les données ». Pour les collectivités qui n’ont pas les moyens et/ou les compétences de gérer ses infrastructures, Orange et Bouygues Telecom proposent des réseaux LoRaWan locaux opérés par eux. Ils disposent également chacun d’un réseau LoRaWan national, qui peut être connecté aux réseaux locaux privés. « Nous avons de plus en plus de demandes en ces sens », assure Stéphane Allaire, de Bouygues Telecom. « Ces réseaux locaux peuvent être connectés à notre réseau national, par exemple pour suivre en produit en cours d’acheminement. Comme pour le cloud, la grande tendance est le réseau LoRaWan hybride, combinant à la fois une approche privée locale et un réseau mutualisé national ».

Côté usages, les réseaux LoRa privés des collectivités sont utilisés pour la télérelève des compteurs électriques, de gaz ou d’eau. Ils servent également à la connexion de capteurs environnementaux (mesure de la qualité de l’air, de l’humidité, de la température…). Enfin, outre les collectivités, notons que ces réseaux privés LoRa se démocratisent aussi sur d’autres secteurs. « Nous déployons des réseaux IoT privés pour des collectivités territoriales, mais aussi des industriels, des hôpitaux ou même des hôtels. Cette approche «hotspot» est devenue notre principale activité en termes de chiffre d’affaires », indique ainsi Yannick Delibie de Kerlink.

L’usine du futur : la 5G mieux positionnée que LPWAN

L’industrie 4.0 est une des applications phare de la 5G. Aujourd’hui, les usines utilisent principalement des technologies filaires pour connecter leurs équipements, notamment les robots et autres automates. Mais l’avenir serait de remplacer le filaire par des connexions sans fil, afin de gagner en flexibilité, pour pouvoir modifier rapidement une ligne de production. Il est en effet plus facile de déplacer des machines connectées sans fil, que raccordées en filaire.

Dans cette optique, les opérateurs télécoms ont largement présenté l’industrie du futur, comme un des principaux cas d’usage de la 5G. La latence à la milliseconde et les débits élevés offrent ainsi une bonne alternative technique aux réseaux filaires actuels. Des capacités que ne proposent cependant pas les technologies LPWAN, qui n’ont clairement pas l’avantage sur ce secteur à très fort potentiel. Mais cela ne veut pas dire qu’elles seront totalement absentes de l’industrie du futur. « Notre expérience nous a démontré qu’il n’y a pas réellement de marché LPWAN pour les processus de production. Mais au niveau du bâti de l’usine, les technologies LPWAN peuvent servir à connecter des capteurs pour les mesures de consommation d’énergie, de température ou d’humidité, afin d’assurer un pilotage intelligent du bâtiment. Avec quelques gateways, il est possible d’assurer la couverture radio d’une usine entière », explique Frank Fischer, d’Adeunis. Encore peu développées en France, les technologies LTE-M et NB-IoT devraient gagner du terrain dans les années à venir, s’accordent à dire l’ensemble des acteurs.

L’usine du futur devrait faire la part belle à la 5G plutôt qu’aux réseaux LPWAN. Ces derniers pourront servir cependant à l’optimisation des bâtiments.

Les LTE-M et NB-IoT boostées par la 5G

Elles sont déjà dominantes dans de nombreuses régions du Globe. Au Royaume-Uni ou au Benelux, l’IoT se développe ainsi plutôt sur ces deux technologies cellulaires. Même chose aux États-Unis. « La basse consommation n’est pas la priorité et l’héritage des technologies cellulaires y est très fort », explique Benoît Bourrel, directeur technique de Birdz, fabricant et opérateur français d’objets connectés. La Chine est quant à elle le pays du NB-IoT qui est utilisé pour l’ensemble des cas d’usages de l’IoT. En Australie, les NB-IoT et LTE-M sont également les technologies les plus déployées.

Avec la 5G, ces deux technologies cellulaires devraient se populariser encore davantage, y compris en Europe. Car les NB-IoT et LTE-M figurent dans la norme 5G spécifiée par le 3GPP. La release 16, publiée à l’été 2020, défini ainsi comment exploiter ces deux technologies avec un cœur de réseau 5G. Rappelons que la 5G a été lancée en France, à la fin 2019, avec des cœurs de réseau 4G, selon le principe du «non-standalone». Mais à l’horizon 2023, les opérateurs devront être passés à la technologie «standalone», avec donc un cœur de réseau spécifiquement prévu pour la 5G. De par cette intégration dans la norme 3GPP, les technologies NB-IoT et LTE-M devraient mécaniquement profiter du déploiement de la 5G en standalone.

Certains acteurs du secteur anticipent déjà une accélération de la demande pour l’IoT cellulaire. « Les véritables applications IoT exploitant la 5G sont attendues à l’horizon 2023–2025. Nous nous y préparons via nos développements autour des technologies NB-IoT et LTE-M qui seront au cœur de la 5G IoT», estime ainsi Taisei Miura, de BH Technologies.

Les zones blanches : l’eldorado pour le LoRa, Sigfox et le satellite ?

Même si les opérateurs télécoms résorbent peu à peu les zones blanches, la couverture de leurs réseaux cellulaires ne couvrira jamais l’ensemble du Globe. Une belle opportunité pour les technologies IoT non cellulaires que celles de Sigfox et pour le LoRaWan, estiment les acteurs du secteur. « Les réseaux privés en LoRaWan sont aussi une réponse aux limites des réseaux télécoms dont la couverture est parfois insuffisante », rappelle Benoît Vagneur chez Sensing Vision.

Cette inégalité de la couverture des réseaux cellulaires ouvre la porte à de futures technologies IoT, comme le satellite. Un créneau sur lequel se positionne la société française Kineis, qui prévoit de déployer une constellation de 25 satellites dédiés à l’IoT. « Nous seront ainsi en mesure de proposer une couverture de 100% du Globe afin de connecter des objets n’importe où sur la Planète », explique Alexandre Tisserand, son président.

Le satellite suscite déjà l’intérêt de plusieurs acteurs du secteur IoT. Synox Group surveille de très près le développement de Kineis tout comme Birdz : « Nous regardons le développement du satellite pour l’IoT dont la couverture mondiale serait un atout dans le domaine de la logistique », confie Benoît Bourrel.

Au final, le marché de l’IoT semble donc suffisamment vaste pour que les technologies réseau actuelles, ou venir, puissent cohabiter. Même si le pionnier du secteur, Sigfox, doit clairement s’adapter au nouveau contexte concurrentiel, la 5G et le LPWAN devraient se partager ce marché florissant. « Nous nous orientons vers une multiplication des technologies réseau IoT et non vers la domination d’une seule », prédit ainsi chez Synox Group Emmanuel Mouton.


Le Finistère mise sur un réseau LoRaWan en propre

D’ici à la fin 2021, le Finistère sera le premier département français à disposer de son propre réseau IoT. À l’exception de Brest Métropole, le département de la pointe bretonne va ainsi disposer d’une infrastructure en LoRaWan, dont le propriétaire sera le Syndicat départemental d’Énergie et d’Équipement du Finistère (SDEF). Baptisé «Finistère Smart-Connect», ce projet a démarré sa phase opérationnelle en février 2020 et doit être totalement bouclé d’ici à quatre ou cinq ans. Il prévoit, à terme le déploiement de cinq cents gateways LoraWan et de plus de plusieurs milliers de capteurs IoT. « Le fait de déployer un réseau propriétaire est un gage de souveraineté numérique. Nous produisons et exploitons déjà nos propres données, liées à l’énergie. Ces données nous appartiennent et nous voulons en rester maître », indique Emmanuel Quéré, directeur adjoint du SDEF. Le syndicat met également en avant la faible consommation électrique de la technologie LoRa, cohérente avec ses engagements dans le domaine de la transition énergétique.

Le réseau IoT doit permettre la mise en place d’un système d’éclairage intelligent, d’optimiser la collecte des déchets, d’améliorer l’efficacité énergétique de bâtiments publics et de proposer des services de détection des places de stationnement disponible (Smart Parking). « Il s’agira d’une infrastructure redondée, chaque objet pouvant se connecter à deux antennes au minimum pour sécuriser le transfert des informations. Les données seront quant à elles protégées par des parefeu et solutions VPN », souligne Emmanuel Quéré.

Financé par le SDEF avec le concours de l’Europe, ce projet devrait coûter un peu plus de deux millions d’euros pour sa 1ère phase (mise en service des plates-formes logicielles et déploiement sur deux territoires pilotes). Le budget de la 2ème phase, qui concernera le déploiement à l’échelle du Finistère, n’a pas encore été communiqué.

Finistère Smart-Connect semble déjà faire des émules. Les départements du Morbihan et de la Loire ont aussi lancé en 2020 des projets comparables, reposant sur la technologie LoRaWan.


Kineis : la déclinaison du système Argos pour l’IoT

Depuis les années 80, le système Argos est utilisé par la communauté scientifique pour la surveillance environnementale, et suivre notamment la migration des animaux. À l’horizon 2023, cette technologie de localisation par satellite, sera également disponible pour les acteurs de l’IoT. La société Kineis, une émanation du Centre national d’études spatiales (CNES), prévoit ainsi de lancer 25 satellites, en complément des 8 déjà utilisés pour le système Argos. Cette constellation servira à localiser un objet IoT n’importe où sur la Planète, avec un passage d’un satellite toutes les 10 minutes. « L’avantage du satellite est de couvrir 100% du globale. À titre de comparaison, la 2G ne couvre aujourd’hui que 15% de la surface de la Terre », explique Alexandre Tisserand, président de Kineis.

Ce système permettra l’envoi et la réception de « quelques messages quotidiens » de 30 octets. Les cas d’usages sont notamment le monitoring de larges infrastructures comme les pipelines de pétrole ou de gaz, ainsi que la logistique industrielle ou la télérelève de compteurs. « Un de nos premiers clients est un grand acteur de l’eau qui utilisera notre réseau pour la télérelève de compteurs en zone rurale », confie Alexandre Tisserand. En février dernier, Kineis a réalisé une levée de fonds de 100 millions d’euros, auprès notamment de Bpifrance, du CNES et de Thales.